Toute mesure prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif constitue une sanction disciplinaire. (C. trav., art. L. 1331-1). A contrario, les observations verbales, auxquelles on peut assimiler les réprimandes, mises en garde, rappels à l’ordre, lettres de mise au point, ne sont pas en principe des sanctions disciplinaires.

Les enjeux ne sont pas des moindres puisque l’idée est de savoir si l’employeur peut, après avoir adressé un rappel à l’ordre, prononcer une sanction disciplinaire pour les mêmes faits, et ce sans tomber sous le coup de l'interdiction absolue de sanctionner deux fois les mêmes faits.

La distinction entre ces situations est donc particulièrement importante.

Or, il n’est pas toujours aisé de déterminer avec précision si tel ou tel écrit de l’employeur constitue ou non une sanction disciplinaire, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’une réponse de l’employeur à un comportement qu’il juge fautif. Cette difficulté a donné naissance à un important contentieux. Alors, comment déterminer les contours de la sanction disciplinaire ?

Concrètement, lorsque l’employeur adresse par écrit des reproches au salarié dans l’intention de l’inviter ou de l’enjoindre à modifier son comportement, cela constitue sanction disciplinaire.

A titre d’illustration, les juges ont considéré que constituait une sanction des reproches écrits détaillés, accompagnés d'une mise en garde et d'une injonction de produire à l'avenir divers documents permettant de mieux appréhender l'activité du salarié (Cass. soc., 1er déc. 2010, n° 09-41.693). Mais aussi, le courriel dans lequel l'employeur formulait des manquements à des règles et procédures internes et invitait impérativement le salarié à s'y conformer (Cass. soc., 9 avr. 2014, n° 13-10.939).

A l’inverse, si l'employeur se contente d'émettre des observations verbales ou s'il constate des faits par écrit sans manifester une intention de sanctionner le salarié, alors il ne s’agit pas d’une sanction. En ce sens, des lettres de l'employeur se bornant à demander à un salarié de se ressaisir et contenant des propositions à cette fin (Cass. soc., 13 déc. 2011, n° 10-20.135) ou le compte-rendu écrit d'un entretien énumérant des griefs sans manifester la volonté de les sanctionner, adressé à la salariée et versé à son dossier (Cass. soc., 12 nov. 2015, n° 14-17.615, n° 1863 FS - P + B).

Ces exemples jurisprudentiels montrent que la frontière entre les deux n’est pas si limpide et s’atténue considérablement.

En pratique, lorsque l'employeur envisage de dépasser le stade de la simple remarque orale et d’adresser une lettre de mise en garde à un salarié en raison de son attitude ou de son travail ; il doit être particulièrement vigilant et notamment veiller à la formulation qu’il emploie, puisqu’en fonction de leurs teneurs, lesdits écrits peuvent être requalifiés en sanction disciplinaire. Bien que l’employeur n’en ait pas conscience, cela s’applique qu’il s’agisse d’un simple mail ou message et les conséquences sont lourdes.

De facto, un salarié licencié pour motif disciplinaire, qui arrive à obtenir gain de cause, c’est-à-dire à faire considérer une lettre de mise en garde comme étant une sanction disciplinaire, obtiendra d’office la condamnation de son employeur au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C’est ce qui a, par ailleurs, été récemment rappelé par la Cour de cassation où les courriers adressés à une salariée, pourtant de simples mises en gardes ou rappels à l’ordre selon l’employeur, ont été requalifiés en sanction disciplinaire, puisque l’employeur y adressait des reproches à la salariée pour des faits qu'il estimait fautifs (Cass. soc. 29 mai 2024, n° 22-19313 D).

C’est pourquoi, pour éviter toute problématique et contentieux en la matière, notre équipe de juristes en droit du travail se tient à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner dans vos démarches et réflexions.

Sara Pereira Cerqueira

Sara PEREIRA CERQUEIRA
Juriste en droit social